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5 mai 2007

Sociologues en Puisaye-Forterre

Voici un article paru dans CaracTerres, le journal du Pays de Puisaye-Forterre.
C'est un résumé d'une étude réalisée par une équipe de trois sociologues : Florence Pinton (Institut de Recherche Développement – IRD d’Orléans), Pierre Alphandéry (Institut National de Recherche Agronomique, INRA Ivry) Yannick Sencébé (Ecole Nationale d’Enseignement Supérieur Agronomique, ENESAD/INRA de Dijon).

Chronique d’une recherche : Ce que cohabiter veut dire en Puisaye-Forterre

Une équipe de sociologues ausculte le Pays de Puisaye-Forterre. Cette recherche ambitieuse fait suite à une demande en 2004 de la Commission agriculture du Conseil de développement du Pays.

Les chercheurs ont d’abord étudié l’émergence des questions environnementales et la qualification du territoire de la Puisaye en « pays ». Puis une recherche portant sur les « modes de cohabitation en Puisaye-Forterre » a été entreprise en vue d’appréhender les recompositions sociales en cours dans les communes, de comprendre comment les habitants s’approprient cet espace et comment ils y cohabitent.

De cette enquête, il ressort qu’en Puisaye-Forterre, l’arrivée de nouveaux habitants, conjuguée au déclin rapide du nombre des agriculteurs, rendent la population de plus en plus hétérogène, bousculant les cadres politiques et sociaux traditionnels de la vie collective. Cette dynamique concerne d’autres territoires, car les campagnes françaises ont gagné par le jeu des migrations 410 000 habitants depuis 1990 : elles comptent aujourd’hui 13,6 millions d’habitants, soit autant qu’en 1962.
Fréquemment idéalisée, la campagne est recherchée pour son cadre de vie, sa nature et ses relations sociales qui semblent échapper aux tensions urbaines. On en oublierait presque qu’on y rencontre aussi pauvreté, solitude, conflits et risques de pollution.
Quoi qu’il en soit, en Puisaye-Forterre comme ailleurs, la diversité des modes de vie et des formes d’appartenances locales rend difficile le partage de références et l’acceptation de normes collectives dont l’existence facilitait autrefois l’intégration des personnes à la vie locale. Aujourd’hui, dans bien des communes, beaucoup d’habitants cherchent leur place, comme en témoigne le développement des conflits concernant l’utilisation de l’espace local. Mais dans ce contexte marqué tout à la fois par le changement et les recompositions sociales, s’inventent aussi de nouveaux rapports humains, se cherchent des règles inédites pour vivre ensemble  et, enfin, se construisent des pratiques modifiant les rapports à la nature, phénomènes observés depuis une dizaine d’années par les sociologues.

Les chercheurs ont voulu explorer par des entretiens les diverses manières de cohabiter. Dans ce but, ils ont pris la commune comme échelle de référence de leurs enquêtes, car elle constitue un lieu où coexistent des univers culturels et sociaux différents, mais aussi comme espace où se perpétuent des manières d’être et de faire.

Leurs travaux nécessitent des investigations nombreuses et précises pour rendre compte de la diversité des configurations sociales qui caractérisent les communes de Puisaye-Forterre. La place (et l’influence) des agriculteurs dans le pouvoir local, en particulier les conseils municipaux, s’avère ainsi très variable, d’une commune à l’autre. Mais bien des agriculteurs ont le sentiment de n’avoir plus de place dans la commune, leur activité étant contestée et les terres exploitées étant considérées de plus en plus souvent en fonction de la conservation de leurs qualités naturelles.

Plusieurs thèmes d’investigations sont actuellement suivis :

- Le patrimoine local, les conflits qu’il suscite (le patrimoine des uns n’est pas celui des autres) et les diverses façons de le valoriser dans le développement communal selon les acteurs.

- L’irruption des questions environnementales dans les rapports entre habitants. La question des haies apparaît, en particulier, comme un remarquable analyseur d’une situation où les agriculteurs ne sont plus qu’une minorité dans des communes où ils contrôlent encore une grande part de l’espace.

- La place du logement social qui implique un délicat équilibre entre la volonté d’accueillir pour développer les communes et la nécessité d’intégrer les nouvelles populations.

Cette recherche devrait faire l’objet de prolongements, tant les pistes de réflexions sont nombreuses et prometteuses. Parmi celles-ci, il faut signaler l’absence d’espaces publics pour discuter et débattre lorsqu’un thème est devenu conflictuel dans une commune. Les conseils municipaux, saturés par les tâches nouvelles issues de la décentralisation, ne sont pas en mesure de jouer ce rôle, malgré le talent de médiateurs de certains maires. Le Conseil de développement du Pays de Puisaye-Forterre a certainement un rôle à tenir en la matière, mais les enquêtes des sociologues montrent que les institutions du « pays » sont encore peu connues des habitants.

On conclura en rappelant que, malgré l’importance du changement que l’on peut observer dans les manières de cohabiter au sein des communes de Puisaye-Forterre, les formes diverses de recompositions sociales n’impliquent pas nécessairement une rupture radicale avec un passé souvent convoqué pour donner sens au présent.

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